Made in Taïwan
Pour les infos pratique sur Taiwan, cliquez ICI
Taïwan est une île assez surprenante…Nous découvrons assez vite que, suite à quelques péripéties de l’histoire, Taïwan est officiellement appelée « la République de Chine », tandis que la Chine est « la République Populaire de Chine ». Attention, ça n’a rien avoir! L’un revendique l’autre, et réciproquement. Bref, Hong Kong n’a clairement pas le monopole du statut bizarre.
On y parle officiellement le mandarin, même si d’autres langues y sont utilisées. Nous voilà donc soudainement plongés au milieu des enseignes en chinois, dans un pays pas beaucoup plus grand que la Belgique et pourtant deux fois plus peuplé. On ne se sent pourtant jamais oppressé, les avenues sont larges et le trafic fluide, les façades vertes sont présentes partout, le métro est efficace, le pays est propre et développé, les gens sont vraiment gentils et accueillants (et surtout personne ne crache!). Le développement urbain se concentre sur toute la côte ouest – celle qui fait face à la Chine bien sûr! – que nous entreprenons de parcourir.
Notre premier hôte à Taipei nous laisse les clés d’un studio rien que pour nous! Un soir nous l’avons partagé avec une autre couchsurfeuse, le reste du temps nous étions parfaitement libres… Un bon début! En plus, juste devant l’immeuble se trouve une station de vélos en libre-service (vélib), et Taipei est une ville toute plate qui se prête magnifiquement bien à la découverte cycliste.
Le premier soir, Pô (notre hôte) nous emmène au marché de nuit pour souper, et nous découvrons tantôt avec dégoût, tantôt avec délice les différents petits plats de nourriture de rue: octopus et sang gélifié ne nous emballent guère, les nouilles et les brochettes restent en revanche une valeur sûre!
Nous passons 5 nuits dans la capitale, déambulant au milieu de cette étrangeté largement chinoise, découvrant des temples extrêmement différents de ceux de l’Asie du Sud-Est, dominés par la pierre et les boiseries rouges, les sculptures de dragons et les pointes de toit recourbées. On visite des bâtiments officiels et des palaces massifs et géométriques, mais toujours d’une symétrie parfaite, des portails assez impressionnants et des ponts rouges aux arcades circulaires qui se reflètent impeccablement dans la rivière remplie de koïs (parfait pour un puzzle de 10.000 pièces).On y trouve également une nourriture beaucoup plus chinoise et nettement moins épicée, (et des burger dont le pain est remplacé par des ronds de riz gluant… #génie). Lors de nos pérégrinations, on tombe même sur un défilé de mode suivi d’un concert!
Mais on découvre aussi dans la capitale des choses qui nous rappellent davantage le Japon, telles que des mascottes ou des personnages bien kitsch comme emblème de grandes marques, des consignes de sécurité dans le métro en version manga, ou des distributeurs de livre/bibliothèques automatiques.
Après ces 5 premiers jours où nous nous acclimatons au changement de décor, nous poursuivons notre route jusqu’à Taichung, où nous sommes logés chez un étudiant japonais cette fois, qui dispose d’un petit studio. Il dort par terre avec une partie de la literie et nous laisse son lit, et nous accompagne lors de la plupart de nos visites (souvent à vélo aussi d’ailleurs) et repas. Il suit depuis quelques mois un cours de français, et nous nous proposons de passer dire bonjour à la classe, mais le niveau étant encore très débutant les interactions sont assez limitées, nous ne restons pas longtemps.
Un soir, Masahiko (notre hôte) nous emmène au nightmarket avec une amie, décidément incontournable ici! On y mange plein de choses différentes et inconnues pour trois fois rien. On y découvre notamment le « stinky tofu » (tofu puant) qu’effectivement on repère par le nez (et les haut-le-cœurs) avant de le localiser avec les yeux. Pourtant, le goût n’a rien avoir avec le parfum, et nous on savourons quelques-uns! Nous découvrons également le fameux « bubble tea », une institution dans le pays! Il s’agit d’un thé glacé, avec des boules de manioc (petites ou grosses) qui vous donnent une impression de tir de mitraillette quand vous aspirez à la paille 🙂
Dans un rayon plus féminin, sachez également qu’à Taïwan, il est impossible de trouver un soutien-gorge simple, on ne trouve que des demi-bustiers super push-up extra-rembourrés, qui sur moi, donne une curieuse impression de voir davantage de mousse que de formes… Mais au bout de quelques semaines je craque! J’ai acheté mon premier push-up… À noter aussi que leur taille unique femme correspond en Europe à une taille enfant… (ya de la place que pour une seule fesse dans cette culotte!).
Après quelques jours de repérage, nous trouvons un scooter à louer pour un prix décent, et le réservons pour aller le lendemain voir le fameux « sun moon lake« , un lac au nom poétique et inspirant dont seuls les Asiatiques ont le secret. Le loueur nous averti que la route pour y aller est mauvaise et dangereuse, il hésite même à changer d’avis et nous devons expliquer notre moto en Belgique, notre parcours, nos diverses précédentes locations en Asie et notre moto au Vietnam, pour qu’il finisse par nous donner les clés… et c’est un peu perplexes que nous découvrons de belles routes macadamisées tout du long, avec certes beaucoup de virage, mais en montagne ce n’est pas franchement une surprise. Définitivement, on n’est plus en Asie du Sud-Est (où l’on s’inquiétait à peine de savoir si nous avions le permis)…
Le sun moon lake est beau, bleu turquoise, grand, et entouré de plusieurs « agglomérations » (ensemble d’une dizaines de bâtiments, exclusivement des hôtels, restaurants et magasins de souvenirs), mais surtout de nombreux temples. Nous nous arrêtons à chacun, découvrant de hautes pagodes ou de larges ensembles de bâtiments, des jardins et des statues (avec une prédilection pour la représentation de la tortue…), des fontaines et des offrandes. Au coucher du soleil nous rebroussons chemin et ramenons l’engin, contents de la journée.
Le lendemain, nous descendons un peu plus au sud à Chiayi, « un village » selon les locaux, « la campagne »… À notre arrivée nous découvrons donc un village de la taille de Namur, en plus concentré… La notion de « campagne » nous semble soudain toute relative…
Nous y sommes accueillis par un monsieur de l’age de nos parents, artiste, qui s’occupe ce matin d’un atelier créatif auquel il nous invite à nous joindre, avant de nous montrer son propre travail, assez beau je dois dire! À midi, il nous emmène déguster un bol de nouilles au boeufs ayant remporté plusieurs concours (oui c’était bon, mais pas décoiffant non plus. Mais surtout, c’était plein de bouts de boeuf qu’on n’a pas l’habitude de manger: tripes, estomac, tendons, … un peu gluant, et pas si appétissant…). Il nous emmène ensuite chez lui où nous posons nos affaires et rencontrons son épouse, avant de repartir avec lui voir une expo d’art où expose l’un de ses amis (mais qui ne nous convainc pas du tout cette fois). Il nous emmène ensuite à un ancien quartier reflétant le passé colonial japonais, à l’époque où ils « engageaient » des locaux pour abattre les forêts des environs pour exporter le bois vers le Japon. étonnamment ce témoin du passé à résister à la volonté d’effacer un passé pénible, pour devenir aujourd’hui un lieu hautement touristique investit de magasins d’artisans et vendeurs de souvenirs comme on en voit partout. C’est aussi d’ici que part le train vers Alishan (connu pour sa technique assez unique de voie en Z pour grimper dans les montagnes), où le lever de soleil vaut apparemment vraiment la peine, où les cerisiers sont en fleurs et où nous hésitons énormément à nous rendre; mais qui d’un autre côté semble totalement artificiel, touristique, et surtout très très cher. Nous abandonnons l’idée. Au soir, le couple décidément désireux de nous montrer les lieux nous emmène voir quelques parcs et un temple, avant d’aller souper ensemble dans un petit restaurant.
Nous ne restons cependant qu’une nuit, avant de poursuivre la route du midi pour s’arrêter à Tainan, où nous avons cette fois réservé une chambre sur AirBNB, un truc tout mignon tout droit sorti d’un catalogue Ikéa.
Nous parcourons la ville et y visitons plusieurs forts (ou plutôt les admirons de l’extérieur puisqu’on ne peut les approcher), contournons d’anciennes murailles, admirons des racines d’arbres qui semblent couler sur les murs d’une ancienne plateforme d’artillerie. Nous poussons un peu plus à l’extérieur de la ville vers la maison arboricole d’Anping qui m’intrigue terriblement, et qui peut être un bon terrain de jeu pour Scotty-photographe-en-herbe.
Il s’agit d’une maison visiblement inachevée, sur laquelle la nature a repris ses droits. Une visite agréable, mais qui stimule apparemment davantage ma créativité que son déclencheur. On y savoure néanmoins une bière belge… le jeu en valait donc bien la chandelle! Nous déambulons également dans une ancienne école confucéenne, ensemble de bâtiments rouges où un pensionné visiblement en quête d’occupation nous fait faire la visite… très gentil, mais un peu collant. Au registre des bâtiments plus spirituels, nous enchainons les temples, tentant toujours de distinguer les temples taoïstes et confuscéens… sans succès, malgré l’aide de Kanice, une locale avec qui nous avons sympathisé! (qui ne sait pas non plus pourquoi les statues ont presque toutes des sourcils plus longs que mes cheveux)
À Tainan nous découvrons également un super-marché Carrefour… avec des produits de la marque « reflet de France »… on regarde le canard, on se regarde, on regarde le calendrier: c’est quasi Noël, on regarde le canard, on se regarde… Bref, pour Noël, on s’est fait des tagliatelles au canard confit! Et le top, c’est qu’on a pu les partager avec Kanice, qui nous a offert de dormir dans sa coloc pour que nous puissions économiser l’hôtel. Et joyeux Noël à vous!
Heureux, savourant les derniers bouts de canards coincés entre nos dents, nous poursuivons vers Kaohsiung, la ville la plus au sud parmi celles que nous voulions visiter. Nous y sommes accueillis par Su, une fille un peu plus jeune que nous, vivant avec ses grands-parents (et un affreux cabot), curieux et chaleureux bien que totalement non-anglophones, et visiblement pas habitués à recevoir des étrangers. En effet, nous sommes les tout premiers couchsurfeurs (mais vraisemblablement pas les derniers!), et passons beaucoup de temps à discuter. Elle s’étonne de nous voir apprécier Taïwan au point de pouvoir envisager d’y habiter, puisque pour elle ici tout est moche et super vieux, les bâtiments remontant aux années 70… l’historienne en moi manque de tourner de l’oeil.
À peine démarrée notre exploration de la ville, nous tombons par hasard sur un spectacle de danse dans un petit parc où une scène a été installée, le tout entouré de nombreux stands de nourriture, souvenirs, artisanat, offrandes. Nous faisons le tour et restons un moment. Un politicien local vient même nous saluer et discuter un peu avec nous (que voulez-vous, on a la vibe ou on ne l’a pas!). (à moins que tout cela ne se soit passé à Taïnan… voilà ce qui arrive quand on écrit trop longtemps après les faits…. je plaide coupable, flagellez-moi!)
Un soir, après une longue journée de marche urbaine, Su nous propose de venir nous chercher en voiture pour nous montrer quelques endroits sympa avec vue sur la ville illuminée. Tandis que nous l’attendons, survient une locale cinquantenaire très souriante, qui nous explique qu’elle se présente aux élections qui auront bientôt lieu, et nous donne un calendrier de campagne… avec des photos pixellisées d’elle en bikini… François Hollande et Hillary Clinton, prenez-en de la graine! Heureusement, notre chauffeur arrive et nous fournit une bonne excuse pour nous échapper. Nous voilà donc embarqué à faire le tour du port, à manger un bout avec ses amis (un plat aux tomates cerises et gingembre… une association qui tue sa race! Avis aux ménagères!), et à prendre quelques photos sur une colline panoramique sur laquelle se trouve 4 grandes lettres éclairées « Love ». Un peu kitsch, mais un peu romantique quand même… Je force Scott à prendre quelques selfies.
De Kaohsiung, nous faisons de l’autostop jusque Taïpeï (un trajet de 4h environ) où nous voulons passer le Nouvel-An. Très rapidement, quelqu’un nous prend. Il ne parle pas du tout anglais, mais nous offre café, eau, boite de cakes, et ne nous lache à Taïpeï qu’après nous avoir amené à l’arrêt de bus et s’être assuré que nous savions lequel prendre, non sans avoir vérifié que le bus nous amènerait bien chez notre hôte suivant! Vraiment adorable.
Nous sommes hébergés cette fois chez quelqu’un de notre âge, qui malheureusement parle assez mal anglais mais suffisamment pour qu’on puisse communiquer sur les choses basiques. Le soir du Nouvel-An il invite tous ses amis, chacun ramenant des bons petits plats. On goûte plein de choses différentes… Vers 11h on descend dans la rue et on suit le troupeau. La police a bloqué les rues, on s’assied au milieu d’un carrefour, pleine vue sur Taïpeï 101 (l’une des plus hautes tours du monde, censée évoquer un bambou, avec – détail qui tue – l’ascenceur le plus rapide du monde) où va avoir lieu un feu d’artifice réputé. Effectivement, il était beau, mais nous restons malgré tout sur notre faim… D’autant que juste après la fin du feu d’artifice, tout le monde se lève et rentre chez soi… Décidément les Nouvel-Ans en Asie sont particuliers! Fêtards s’abstenir…
Ayant encore une dizaine de jours devant nous et ne sachant pas trop quoi en faire, nous finissons par nous décider à bouger vers Hualien pour visiter le parc national de Taroko et ses fameuses gorges. Nous sommes accueillis en couchsurfing par une jeune infirmière vivant avec son père et partageant la plupart des repas avec leurs voisins, curieux de nous rencontrer également. Ils nous laissent une chambre, nous font à manger, nous donnent un scooter et nous montrent des techniques de guérison. Avec eux, nous visitons le marché local (où nous verrons entre autres choses, un oeil de poisson d’une taille assez impressionnante! Mais à quoi cela peut-il bien servir?), mais n’arriverons jamais à payer quoi que ce soit… Le soir, nous dégustons tous ensemble une fondue, surpris néanmoins de voir tout le mal qu’un gros couteau peut faire à un magnifique demi-poulet (en Asie, on ne s’embête pas à trier, on coupe à travers tout, os, cartilage et peau avec…). En retour nous leur cuisinons des pâtes bolo, espérant garder de la sauce pour le lendemain… mais apparemment le repas plait un peu trop, et le voisin termine le tupperware à la cuillère 🙂
Le lendemain, nous partons à deux scooters, Scott et moi sur l’un, notre hôte et la voisine sur l’autre, vers le parc national. Une route le parcourt entièrement, avec des parkings et des départs de balades à pied tout du long. Nous nous laissons guider, et découvrons les paysages vertigineux et les temples cachés, tout en papotant de tout et de rien. À notre grande surprise, elles nous demandent pourquoi on ne prend jamais de selfies… C’est de la photo un selfie?
Nous décidons ensuite de calmement retourner sur Taïpeï profiter de nos coins habituels encore quelques jours. Nous passons quelques nuits en auberge, et quelques nuits chez un jeune couple, elle taïwanaise, lui est-européen. Et décidément, avec les Européens de l’Est, le courant passe moyennement… Peu importe, nous passons nos journées dehors, tentant cette fois les coins d’artistes bobos, d’anciennes usines désaffectées réaménagées en lieux de création artistique sous diverses formes. Et de quartiers bobo en shopping malls, nous nous étonnons de voir le nombre et la variété d’artistes de rue et savourons l’après-midi.
Nous décidons aussi à aller voir le magnifique musée national. Le musée est un peu plus en périphérie, et c’est un peu une expédition pour s’y rendre. Mais hors du centre-ville on se surprend à rêver à la location des appartements qui nous entourent… Lors du retour, nous louons des vélos pour rejoindre une station de métro. Et tout d’un coup dans la station, Scott remarque qu’il n’a plus son téléphone… On panique, on dévisage tous les gens autour de nous, on tente de se rappeler la dernière fois qu’on l’a eu en main… à vélo, comme gps… On court jusqu’à la station vélib, mais quelqu’un a reloué notre bécane. On revient dans le métro pour profiter du wifi, et on tente de localiser le téléphone (les joies des services samsung!). Scott le localise, re-court louer un vélo, et fonce au point indiqué, tandis que hors d’haleine, je tente vainement de le suivre, et finalement reste en arrière. Après un moment il revient, la localisation ne bouge pas mais on craint qu’il soit dans le coffre d’un scooter garé dans la rue. On refait le trajet plus calmement ensemble, et on s’aperçoit qu’en face des scooters suspectés, se trouve un commissariat de police… Hé oui, les Taïwanais sont des gens vachement honnêtes, qui quand ils louent un vélo et voient un smartphone dans le panier, le dépose au commissariat le plus proche. À moins que ce soit encore une fois Scott qui ait juste un bol tellement incroyable que ça en devient malsain… C’est donc gonflés d’adrénaline et agrippés à nos smartphones que nous redescendons sur Taïchung une deuxième fois, pour aller prendre notre avion vers Hong Kong…